jeudi 1 septembre 2011

Julley*, Danybad*, Tou djé tché*, Merci...

Avant de refermer cette grande page d'aventure qu'à été "Pèlerins d'altitude" pendant près de 6 mois et demi nous souhaitions adresser à tous nos proches, amis, compagnons de voyage et inconnus (qui ne le sont désormais plus!) un grand MERCI !!! Vos commentaires ont constitué un moteur fort qui nous a permis de surpasser nombre d'obstacles durant cette traversée himalayenne. Toujours pleins de tendresse et de sollicitude, ces petits "billets d'humeur" nous ont rappelé que même dans les contrées les plus reculées du globe, à des milliers de kilomètres de la France, nous n'avons pas été oublié...

En espérant que nos récits ont fait émerger chez certains lecteurs des envies de voyage et d'aventure. Nous attendons ainsi de pouvoir lire à notre tour le blog de l'un d'entre eux !

* Julley : merci en langue ladakhi
   Danybad : merci en langue indienne et népalaise
   Tou djé tché : merci en langue tibétaine

Ama Dablam, massif de l'Everest


lundi 29 août 2011

Puisqu'il faut une fin....

Tout doucement la chaleur du soleil vient réchauffer nos extrémités engourdies par le froid nocturne. Nous redescendons rapidement l’arête sommitale où se pressent désormais les groupes pour franchir le raidillon final. Au bas de la grande pente nous nous offrons une petite pause et partageons nos maigres vivres avec le guide sherpa d'une autre équipe de grimpeurs. Le glacier est vite avalé. Avant de replonger vers le camp de base nous jetons un dernier regard vers la cime du Stok Kangri comme pour nous assurer que tout cela n'a pas été qu'un rêve. Il est a peine 9 heure lorsque nous retrouvons Lotus sous la tente cuisine.
Le lendemain matin le mauvais temps se réinstalle sur les montagnes et c'est sous les flocons de neige que  nous replions les affaires. La pluie prendra le relais durant toute la descente vers le village de Stok.

De retour a Leh nous profiterons de nos derniers jours en terre Ladakhi pour bouquiner, se goinfrer de pâtisseries et se reposer de tant de kilomètres parcourus. Nous mettons aussi à profit ces quelques jours chômés pour rendre visite à nos amis moines de Saboo et jeter un œil à la librairie dont la construction a drôlement bien avancé.

Le 23 août au petit matin,  l'avion s'arrache lourdement de la piste poussiéreuse de Leh. Comme un dernier clin d’œil que nous feraient les montagnes himalayennes, nous contemplons enfin à travers le hublot la lointaine chaîne du Karakorum et ses sommets mythiques : le K2 et le Nanga Parbat. Peu a peu les hautes cimes s’éloignent et les nuages de la mousson reprennent du terrain. Nous atterrissons à Dehli dans une ambiance d'étuve qui nous fait rapidement regretter le doux climat d'altitude. Heureusement nous ne resterons que 24 heures dans cette mégalopole trop bruyante,  polluée et surpeuplée.

Le 25 aout, à 5 heures du matin, l'Airbus de la compagnie Turkish Airline s'engage sur la piste de l'Indira Gandhi International Airport. Sitôt le feu vert accordé par les contrôleurs aériens, les réacteurs mettent en branle la carlingue de l'appareil qui commence a prendre de la vitesse. 5, 4, 3, 2, 1, ... soudain la queue de l'avion se lève nous propulsant ainsi dans l'air déjà tiède du jour naissant. Les images des six derniers mois se bousculent dans nos têtes et déjà la nostalgie des longues journées de marche à travers les montagnes himalayennes nous guette. Nous nous promettons cependant de revenir un jour explorer d'autres vallées, gravir d'autres sommets, côtoyer d'autres peuples...  Ainsi se termine l'aventure !

mercredi 24 août 2011

Stok Kangri : petit flirt avec les nuages.

On ne s'imagine pas la quantité de détails qu'il faut régler avant de s'embarquer pour une telle expédition, si petite soit-elle ! Afin d’êtres autonomes et libres de nos choix, nous n'avons fait appel à aucune agence de trekking pour organiser la logistique. Ceci complique donc aisément les démarches. Néanmoins, grâce à Tenzin, nous trouvons un "donkey-man" (muletier). Puis, tous ensemble, nous partons arpenter le marché afin de réunir les vivres nécessaires à l'entreprise, trouver du carburant (pour le réchaud), acquérir les permis d'ascension, louer le matériel d'alpinisme (corde, piolet, crampons), etc. Afin de diminuer le temps de cuisson des aliments, nous faisons même l'acquisition d'une petite cocotte-minute toute neuve !

Enfin, au matin du 10 aout, l'ensemble du matériel est chargé à bord d'une jeep à destination de Stok, point de départ du trek. Sitôt les ânes bâtés, nous nous enfonçons silencieusement dans d’étroites vallées rocailleuses, peuplées par de gigantesques troupeaux de mouflons sauvages. Nous rallions ainsi le camp de base après deux courtes étapes, conscients que le succès d'une telle ascension dépend avant tout d'une bonne acclimatation.
Dans la soirée nous retrouvons Nicolas (randonneur que nous avons rencontré dans le Zanskar puis à Leh) et décidons d'unir nos destins et nos efforts dans la conquête du sommet. Le lendemain, nous parachevons notre acclimatation en allant explorer les moraines et le glacier du Golep Kangri, éprouvant notre condition physique jusqu’à l'altitude de 5400 mètres.
Mais les dieux semblent vouloir s'opposer à nos desseins car le soir-même les nuages s'en mêlent et viennent saupoudrer, 24 heures durant, les hautes cimes d'une épaisse couche de neige. A l'abri de notre tente le moral vacille et nos chances de réussite s'effilochent...
Par chance, nos prières soufflent la perturbation et le ciel retrouve un peu de sa sérénité.

Il est a peine 1 heure lorsque ce matin du 14 août nous amorçons nos premiers pas en direction de l'effroyable face plâtrée du Stok Kangri. Très rapidement nous traversons le glacier débonnaire afin de nous engager dans la grande pente de neige. Le rythme ralentit !
Une montée de 500 mètres puis une traversée horizontale nous conduisent sur le fil de la crête sommitale. Le ciel se voile alors et un froid mordant vient s'ajouter à la fatigue. A notre gauche se découvrent de vertigineux précipices. Pas vraiment le droit à l'erreur... Nous chaussons donc les crampons.
Pas après pas, mètre après mètre, nous gravissons les 200 derniers mètres qui nous séparent du point culminant. Autour de nous la brume se dissipe lentement. Soudain, au détour d'un dernier éperon rocheux, plus rien ne s'oppose à notre vue que le bleu du ciel. Au loin, le jour naissant vient embraser les hauts pics du Lahaul, du Spiti, du Zanskar et du Laddakh. Nous venons de gravir les 6154 mètres du Stok Kangri. Largyalo !!!! Une fois de plus, les dieux sont vainqueurs...



Lotus, notre muletier et compagnon d’expédition

Camp de base 

Glacier du Golep Kangri

Petite balade d'acclimatation

Hélène, Jonathan et Nicolas au sommet du Stok Kangri

Preuve à l'appui...

Au dessus de la mer de nuages

Face plâtrée au retour du sommet

mardi 16 août 2011

Itinérance cachemirie

Ce matin du 27 juillet, nous montons dans une jeep afin de rallier la ville de Manali. A travers les fenêtres défilent les glaciers du Lahaul. La route prend l'aspect d'un long serpent tentant de se frayer (parfois avec peine) un chemin a travers le relief tourmente. Nous arrivons bientôt au pied du Rothang La : ce col marque en quelque sorte la frontière climatique avec le reste de l'Inde. De l'autre cote de la passe la mousson fait son travail de sape, érodant chaque jour un peu plus la piste déjà précaire. Après plus de 8 heures de trajet nous arrivons enfin a Manali ou nous dénichons, a notre plus grande joie, une petite guest-house tranquille sur les hauteurs de la vieille-ville.
Les 2 jours qui suivent seront consacrés a la reconstitution de nos stocks lipidiques dans les nombreuses pâtisseries du "Old Manali".

Le 29 juillet au soir, nous quittons la "Suisse Indienne" pour nous rendre a Dharamsala, résidence du Dalai Lama en exil. Nous arrivons a Mac Leod Ganj en même temps que pointent les premières lueurs du jour. Beaucoup parlent de la ville comme étant la "petite Lhassa". Nous n'y voyons que des commerces et un palais  moderne qui n'a en rien le charme du Potala. Très rapidement nous étouffons dans les ruelles bruyantes de la cite. Décidés a ne pas moisir dans les parages, nous prenons un bus pour Jammu puis Srinagar, fuyant par la même occasion l'humidité insupportable de la mousson.

Plus les kilomètres défilent et plus la nostalgie de la marche nous gagne. Pres de 20 heures de trajet nous seront nécessaires pour gagner la capitale d'été du Cachemire. La, nous soufflons enfin, prenant un peu de répit sur une house-boat (maison flottante) du lac Dal. 3 jours durant nous sillonnerons tantôt les jardins mogols tantôt les ruelles pittoresques de la vieille-ville. Le soir venu, lorsque le disque solaire s'apprête à mourir dans les eaux du lac, nous parcourons a la rame les canaux et jardins flottants a bord d'une modeste Shikkara (barque a fond plat). Au loin résonnent les appels a la prière du muezzin, nous rappelant que nous sommes désormais en terre musulmane.

Nous repartons de Srinagar le 5 aout, certainement par la bande de macadam la plus dangereuse d'Inde. En effet, la région étant convoitée par le Pakistan, de nombreux combats se sont déroulés le long de cet axe-frontière. Les tensions se matérialisent ainsi par la présence massive de militaires le long de la route. Après une courte halte a Kargil, nous retrouvons enfin la quiétude des ruelles de Leh. La boucle est bouclée !

Le voyage touche désormais a sa fin mais avant de rentrer en France un dernier defi de taille nous attend : l'ascension du Stok Kangri, un sommet de plus de 6000 mètres qui trône en maitre sur les  hauteurs de Leh. Ainsi, l'aventure continue parmi les neiges éternelles du Laddakh...


Sur les flancs du Rothang La

Old Manali

Mac Leod Ganj

Shikkaras sur le Dal Lake

A la peche...

Martin-pecheur a l'affut

Jardin Moghol 

lundi 8 août 2011

Voyage aux sources du fleuve Zanskar

A Chilling, nous engloutissons rapidement notre soupe aux nouille puis repartons a l'assaut du Dundunchen La sous une chaleur assommante. La pente est si raide que chaque pas devient un défi constant qu'il nous faut relever face aux lois de la gravite. Aux déserts d'altitude succèdent des hauts pics déchiquetés que viennent couronner des glaciers funambules. A chaque pause, nos yeux d'alpinistes scrutent les aretes et les parois abruptes a la recherche d'improbables itinéraires. Conscients que plus de la moitie des sommets environnants sont encore vierges, nous nous promettons de revenir user nos doigts sur ces gigantesques dentelles de roc. Mais pour l'instant, l'heure est a la marche !

A Hinju, nous retrouvons la piste dont le trace amène désormais les véhicules jusqu'au village de Photoksar. Dédaignant le confort d'une jeep, nous userons deux jours durant nos semelles et notre moral sur cette autoroute pour trekkeurs. La fatigue accumulée lors des derniers jours nous impose a prendre un jour de repos dans le pittoresque village de Photoksar. Dans une humble maison accrochée a la falaise, une famille zanskari nous accueille sous son toit. Nous profiterons de cette journée sabbatique pour participer activement aux taches domestiques telles que la fabrication du beurre, la traite des chèvres et la préparation des repas. De ces moments simples partages avec nos hôtes, émergent rapidement des liens émotionnels forts.  Comme a chaque fois, nous repartons le coeur un peu lourd, laissant une part de nous même chez ces familles dont les valeurs humaines nous aurons tant fait grandir durant ces mois de voyage.

Sur le chemin du Senge La, nous surprenons le jeu des marmottes au milieu d'incroyables champs  d'Edelweiss. Décidément le Zanskar se fait désirer : il nous faudra encore franchir 4 cols avant de distinguer enfin, du haut du Parfi La, les eaux laiteuses du fleuve mythique. Deux fastidieuses journées seront consacrées a remonter sons cours jusqu'à la vaste plaine alluviale de Padum. C'est ici, dans ce triangle fertile, que nait le Zanskar, résultat d'une communion entre la Tsarap et la Dota.

Pas vraiment emballes par l'idée de marteler le macadam de la nouvelle route, nous optons pour le taxi local. Ainsi, nous voyagerons a l'arrière du pick-up, coincés entre les cageots de patates et de choux, afin de rallier le village de Ichar. De la, nous renouons avec la marche et les sentiers poussiéreux. Décidés a ne pas manquer la visite de Phuktal, nous faisons un petit détour afin d'aller dormir au pied du monastère le plus photogénique de la région. Le lendemain, nous rebroussons chemin et filons vers le hameau de Tangtse ou nous attendent Tenzin et Vincent*.
Nous nous offrons une "journée de congé" que nous occuperons a bavarder, manger, jouir de la simplicité des paysages, jouer avec les petites nièces de notre hôte, boire les nombreux thés au beurre, etc. Afin de clore cette journée d'oisiveté, nous nous offrons le luxe de dormir a la belle-étoile. Ce soir-la, les yeux perdus dans l'infini de la voute céleste, nous n'aurions échangé notre place contre aucun des palais de ce monde.

Peu a peu, les cultures d'orges s'effacent au profit des alpages d'altitude. Une fois de plus, la barrière himalayenne dressent devant nous une série de monolithes acérés. La brèche s'appelle Shingo La (5090m) et marque la sortie du Zanskar. De l'autre cote du col, nous entrons au Lahaul. Nous n'avons plus qu'à nous laisser rouler jusqu'à Darcha ou nous rejoignons la route Leh-Manali. Les jambes vont pouvoir souffler. C'en est fini de la marche (ou presque) ! Désormais, nous sillonnerons les montagnes du Cachemire en bus. L'aventure se prolonge donc par la biais de moyens motorises...


* Tenzin, Vincent (Lorraine), Frieder et Petra (Allemagne/Autriche), Lobsang, Padam, Angchuk, Odile et Remi (région parisienne) : trekkeurs et leur staff avec qui nous avons sympathisé le long du chemin et qui nous ont souvent accueillis sous leur tente pour partager un thé, une bière ou un repas.



Fabrication du beurre

Village de Photoksar

Monastère de Lingshed
 
Méditation somnolente



Plaine de Padum

Monastère semi-troglodyte de Phuktal
Kargiak au crépuscule
Champ d'Edelweiss
Shingo La (5090m)